Probablement un des indicateurs les plus marquants relevé au cours du « Bilan 2022 sur la sécurité intérieure ». Avec 47 homicides enregistrés en 2022, la Guyane surplombe les taux d’homicides pour 100 000 habitants du Suriname (7,7) et du Guyana (15,2).
Dans sa « cartographie des homicides », le service ministériel de la sécurité intérieure alertait déjà au début de l’année : « le taux d’homicides pour 1000 habitants est plus élevé dans les régions ultramarines qu’en métropole ». En cumul, sur les trois dernières années, il atteint notamment 0,137 pour 1000 habitants en Guyane sur la période 2020-2022. C’est deux fois plus que le taux comptabilisé en Guadeloupe entre 2020 et 2022 (0,064), deuxième département ultramarin de ce macabre podium.
21 meurtres « crapuleux » sur 47
Sur le plateau des Guyanes, notre département enregistre, en 2022, 47 homicides. Autant qu’au Suriname, le plus petit pays d’Amérique du Sud (612 985 habitants) où la majeure partie des crimes sont en lien avec le trafic international de drogue, souligne insightcrime.org, site spécialisé en criminalité organisée. Si on élargit légèrement le cercle comparatif, la Guyane française se positionne de facto entre le Guyana (15,1 meurtres pour 100 000 habitants / 122 meurtres en 2022) et le Guatemala (17,3 meurtres pour 100 000 habitants / 3 004 meurtres en 2022) avec un taux d’homicide pour 100 000 habitants qui s’établit à 15,8 en 2022.
D’après le tableau dressé ce vendredi 10 février en conférence de presse par le préfet Thierry Queffelec, le nombre d’homicides sur le territoire a donc augmenté de 51 % entre 2021 (31 meurtres) et 2022 (47 meurtres). 21 de ces meurtres sont qualifiés de « crapuleux », ils ont été commis « à l’occasion d’un vol ou d’un règlement de compte ». Les autres (26) sont dits « non crapuleux », ils relèvent du milieu familial, et englobent les deux féminicides de l’année passée.
Vols à main armée
Pour autant, malgré cet indicateur rouge vif, les autorités présentes dans les salons de la préfecture ont souligné, dans une analyse de la délinquance plus globale, un léger déclin des vols de véhicules (-27 % en 2022 pour 591 faits constatés) et des vols à main armée (-14 %, pour 867 faits constatés) en 2022. Cela dit, comme le souligne la préfecture dans sa communication, les vols à main armée commis en Guyane correspondent à 10 % de la totalité des vols à main armée constatés au niveau national. « Dans 63 % des cas, c’est une arme à feu qui est utilisée » et « près de la moitié des faits [46 %] sont commis dans la commune de Cayenne », précisent les services préfectoraux. Saint-Laurent du Maroni comptabilise à elle seule 24 % des VAMA*. Matoury enregistre quant à elle 22 % des VAMA. Selon la gendarmerie de Guyane, un tiers des vols à main armée ont été élucidés l’année passée.
Violences sexuelles et intrafamiliales
A l’échelle nationale, la Guyane enregistre le nombre de violences sexuelles pour 1000 habitants le plus élevé avec 2/1000 habitants, devant la Réunion et la Martinique, soit 570 faits. Cependant, l’augmentation du nombre de violences sexuelles par rapport à l’année 2021 (554 faits) n’est pas significative (+3 %, contre + 11,4 % au niveau national). Les violences intrafamiliales évoluent aussi défavorablement (1246 faits enregistrés en 2022, contre 1149 en 2021). En Guyane, le nombre de violences intrafamiliales pour 1000 habitants s’élève à 4,4 pour 1000 habitants. La moyenne nationale est de 2,7 pour 1000 habitants. Selon le procureur Yves Le Clair, les violences sexuelles et intrafamiliales représentent 5 à 6 gardes à vue par jour dans les locaux de la police ou de la gendarmerie.
Orpaillage illégal
D’après le Général Sintive, commandant de la gendarmerie de Guyane, le territoire compte moins de 300 sites d’orpaillage illégal à ce jour. Les patrouilles, qui mobilisent quotidiennement 386 militaires en moyenne, et les dispositifs déployés dans le cadre de la lutte contre ce fléau auraient permis d’infliger un « préjudice financier » de 35 millions d’euros aux Garimpeiros sur la seule année 2022. Une année durant laquelle les militaires ont saisi 59 kg de mercure et détruit 6 236 carbets d’orpailleurs illégaux.
L’heure du bilan pour la justice
Des chiffres alarmants, mais quelle réponse apportent les autorités ? L’objectif de ce point presse matinal était aussi de souligner l’efficience de « la réponse judiciaire », a rappelé le préfet Thierry Queffelec. « Face à un volume d’infractions qui a peu évolué, les services ont privilégié le qualitatif », assure, de son côté, le procureur de la République de Cayenne. Pourtant, le nombre de gardes à vue a considérablement augmenté. Le parquet en recense, à la louche, 4500 sur l’année 2022 dont 500 concernant des mineurs. Sur le millier de déferrements réalisés dans les bureaux du parquet de Cayenne, 87 concernent des moins de 18 ans. D’après le procureur, 12 mineurs sont actuellement incarcérés à la prison de Rémire.
* Vols à main armée
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