7 magistrats seront installés le mercredi 1er février dans leurs nouvelles fonctions au tribunal judiciaire du Larivot. Du « sucre rapide », dans les mots du président Mahrez Abassi, qui attend des renforts pérennes d’ici à la fin de l’année.
Leur cri d’alarme a été entendu à la fin du mois de septembre. Mais pour autant, les acteurs du monde judiciaire en Guyane sont toujours en attente de moyens importants pour pallier à une situation qui se complique au fil des années.
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Classé en catégorie 3, le tribunal judiciaire fonctionne à flux tendu par manque d’effectifs et d’attractivité des postes. Face au déficit de moyens, le président du tribunal correctionnel, Mahrez Abassi, avait ainsi annoncé le 29 septembre un mouvement de « justice morte ». Pendant près de trois mois, seules les personnes détenues ou renvoyées devant le tribunal dans le cadre de la comparution immédiate ont été jugées.
Une « task force » de magistrats
« Nous avions décidé de supprimer toutes les audiences correctionnelles et pénales dites non urgentes, soit toutes les audiences hors comparutions immédiates et jugements de personnes en détention. Les personnes concernées ont été reconvoquées pour l’année 2023 voire, malheureusement puisque nous sommes dans une situation de tension très forte, au premier trimestre 2024. » explique, dans un entretien exclusif accordé à Mo News (à lire dans notre édition hebdomadaire), le président du tribunal.
Les audiences ont finalement repris leur cours normal le 3 janvier. Au cours de ce laps de temps, le Garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti, en visite en Guyane, a annoncé le déploiement d’une « task force » de magistrats en Guyane et à Mayotte. Une mesure qui est désormais suivie d’effets, puisque 4 juges et 3 parquetiers sont arrivés les 27 et 28 janvier en Guyane. Ils seront installés dans leurs nouvelles fonctions – pour une durée de 6 mois – le 1er février. Au cours du même mois de février, 7 greffiers seront affectés en Guyane, 5 à Cayenne et 2 à Saint-Laurent du Maroni. Un « ouf » de soulagement pour le service des greffes, en manque chronique de fonctionnaires, pourtant nécessaires au bon déroulement des audiences.
Eric Dupond-Moretti à l’assemblée plénière de la CTG le 30 octobre 2022.
Cela dit, il s’agit là d’une décision qui ne règlera pas les problèmes d’effectifs de façon pérenne, selon le président du tribunal. « Avec les brigadiers qui vont arriver et les contractuels qu’on peut embaucher, il y a une notion de sucre rapide. Il nous faut aussi du sucre lent, c’est-à-dire des affectations en mobilité, des magistrats et des fonctionnaires qui viendraient pendant plusieurs années. Maintenant, on doit augmenter l’attractivité des juridictions de première instance comme celle de Cayenne. » corrobore Mahrez Abassi.
« Désespérance »
Le 30 septembre, après avoir prêté l’oreille aux doléances des chefs de juridiction, le Garde des Sceaux annonçait la création de 5 postes fixes en Guyane à compter de septembre 2023, dont un cabinet de juge d’instruction. Par ailleurs, il effleurait l’idée d’installer au tribunal un parquetier en « prise directe » avec la Juridiction Interrégionale Spécialisée (JIRS) de Martinique, en charge des enquêtes sur des affaires dites sensibles, notamment dans le domaine financier, et dont l’éloignement cause des difficultés dans le suivi des dossiers pour les avocats.
Avec 30 magistrats et 12 parquetiers installés dans les couloirs du tribunal judiciaire déplacé depuis la crise de l’amiante, les conditions matérielles ne sont pas encore réunies, selon Mahrez Abassi. Censé mettre un terme au fonctionnement en sites éclatés, les travaux de la future cité judiciaire de Cayenne ont d’ailleurs pris plus d’un an de retard.
« Il y a aujourd’hui une forme de désespérance exprimée par les fonctionnaires qui voient cette cité judiciaire comme la cité de Babylone » relatait le président du tribunal correctionnel au cours de cet entretien avec Mo News. D’autant plus que le nombre grandissant de décisions pénales en attente d’exécution n’a cessé d’augmenter, pour atteindre des seuils éloquents : plus de 6000 décisions pénales prononcées par le tribunal correctionnel de Cayenne n’ont toujours pas été exécutées, contre près de 2500 à Saint-Laurent du Maroni.
Selon plusieurs spécialistes, le repositionnement du tribunal judiciaire de Cayenne en catégorie 2 (au lieu de 3) permettrait d’assurer une meilleure attractivité des postes au sein d’un tribunal qui se veut « sous-calibré ». Une proposition notamment formulée par l’avocat Guyanais Patrick Lingibé, également vice-président de la Conférence des bâtonniers, dans un article à lire sur le site spécialisé actu-juridique.fr.
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