Qui, quand, quoi, comment
->L’Ecole de la deuxième chance est l’initiative d’Edith Cresson, ancienne ministre française, qui souhaitait un engagement fort sur le décrochage scolaire.
-> La ville de Marseille fût la première, il y a 25 ans, à lancer une Ecole de la deuxième chance.
-> N’ouvre pas une telle structure qui veut, pour disposer de « cette marque », il faut suivre un processus de la labélisation.
-> En Guyane, l’Ecole de la deuxième chance est implantée à Cayenne depuis 2018 et placée sous l’égide de l’Association Réseau d’Acteurs Guyanais pour une Insertion Réussie, RéAGIR.
Gros plan sur l’Ecole de la deuxième chance, un centre de formation en alternance, qui accompagne les 18- 25 ans et leur offre des perspectives d’emplois et de formations.
Le nom « Deuxième chance » pourrait laisser penser que celles et ceux qui franchissent les portes de la structure « ont échoué » une première fois. Et pourtant, ce n’est pas du tout l’esprit du concept dont la valeur est inestimable.
Ils sont 9 au sein de l’équipe pédagogique qui encadre les 160 jeunes que compte actuellement l’école de Cayenne.
Leur action est non négligeable et fructueuse à un tel point qu’une deuxième Ecole doit ouvrir, d’ici à la fin de l’année, à Saint-Laurent du Maroni.
Un vaste réseau pour « la Deuxième chance »
Le site de Guyane est le petit dernier de la grande famille des Ecoles de la deuxième chance, qui sont au nombre de 153, sur l’ensemble du territoire français.
La mission est claire et précise : entourer et accompagner les jeunes vers l’excellence et surtout leur démontrer qu’ils sont acteurs de leur vie professionnelle… De leur vie, tout court !
Ici, tout est mis en œuvre pour leur offrir un environnement serein et encourageant afin d’aboutir à l’objectif : emploi et/ou formation.
Travailler l’estime de soi, la présentation physique ou verbale, aider dans les démarches administratives. C’est un vrai réseau qui est mis à la disposition de celles et ceux qui sont là soit après un « incident de parcours » soit à la suite d’une erreur d’orientation. Bref, au-delà du schéma classique de l’école, tous les profils sont pris en charge pour leur permettre de rebondir.
La réussite au bout
Et le travail paye puisque la structure guyanaise compte plus de 70% de réussite, le fruit d’un partenariat avec près de 300 entreprises locales, notamment.
Justement, le financement reste le nerf de la guerre et un élément moteur de l’Ecole de la deuxième chance. En effet, il s’agit d’une association qui s’appuie sur la taxe d’apprentissage et d’autres subventions qui ne sont pas toujours simples à obtenir.
La fine équipe au service de l’école comprend 9 personnes évoluant dans deux pôles ; l’un administratif qui se compose d’un directeur, d’une assistante de direction, d’un agent d’accueil polyvalent et l’autre, axé sur la pédagogie, qui compte quatre formateurs référents, une chargée de relations- entreprises et un responsable pédagogique. Elle fait vivre avec un certain dynamisme, ses différents réseaux sociaux, d’autres outils majeurs dans le développement de la structure.
Questions / Réponses avec Gilles DOLOR – Directeur de l’Ecole de la deuxième chance, Guyane.
N’est-ce pas frustrant de n’accueillir que 160 jeunes quand on connaît les difficultés d’une partie de la jeunesse chez nous ?
Notre volonté est de les placer en emploi et en formation. L’existence de l’Ecole s’adapte à la réalité du tissu économique. On pourrait avoir 900 jeunes sans pouvoir les placer derrière. Il suffit de regarder le nombre de demandeurs d’emploi et malheureusement on ne peut pas dire que l’Ecole de la deuxième chance va résoudre tous les maux de la jeunesse guyanaise.
Dans quelles dispositions sont-ils quand ils franchissent la porte ?
Il y en a qui arrivent, qui n’ont du tout de projets et qui sont perdus. Parfois, ils sont en situation de handicap et ils ne le reconnaissent pas. D’autres sont carrément désespérés, ils sortent d’incarcération et tout ce qu’ils ont connu, c’est la galère. Ils n’ont aucune perspective. Notre idée aussi est de les ramener vers la réadaptation. Je ne me base pas sur les chiffres. Vous savez les chiffres, c’est quelque chose, qu’ils soient bons ou mauvais, on peut toujours les interpréter.
Vous boostez leur motivation en fait…
Quand un jeune arrive à l’Ecole de la deuxième chance, mon objectif est de lui faire comprendre son rôle dans la société. Son rôle dans la société, c’est payer des impôts, avoir une vie de famille, être un bon citoyen, voter. On apporte ces choses-là à un jeune et s’il comprend tout cela, il aura compris qu’il faut qu’il travaille et la valeur d’un emploi. Pour moi, leur apporter tout cela, c’est parfois débloquer des situations.
Jusqu’où accompagnez-vous ces jeunes ?
S’ils ont besoin d’un logement, d’un matériel informatique, on voit avec nos partenaires. On fait de la remobilisation. On ne travaille pas que sur des compétences écrites. On travaille aussi sur le savoir-être, la citoyenneté, la culture, l’environnement. On accompagne sur la levée des freins sociaux avec nos partenaires, par exemple dans les problématiques d’hébergement, de parentalité, de santé, de violences, de handicap, etc.
Est-ce à dire que vous formez l’homme au sens général ?
On forme l’homme avec un grand H mais on a conscience que nos objectifs sont l’emploi et la formation. On travaille tous les éléments autour qui peuvent freiner cette entrée. On sait bien qu’il faut un compte en banque, une sécurité sociale pour être employé. Si ces conditions ne se sont pas remplies, ça va bloquer la possibilité d’emploi ou de formation offerte à ce jeune.
Il y a-t-il des cas désespérés ?
Chez nous, ils arrivent avec un potentiel. C’est la première chose que nous leur disons : ne laissez personne vous dire que vous n’êtes pas capables !
Vous êtes des dénicheurs de talents ?
Nous sommes des révélateurs de talents. On va les aider à prendre conscience de leurs compétences et de leurs valeurs.
Hermann ROSE-ELIE / Rudy COCHET