Après parution de l’article « Le DRH de la mairie de Cayenne s’est fait embaucher avec de faux papiers », publié dans nos colonnes le 29 mars, l’avocat de l’homme mis en cause a demandé d’exercer son droit de réponse, en application de l’article 13 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse. Nous lui avons donc accordé un entretien.
Votre client a-t-il été licencié depuis la conférence de presse de la mairie de Cayenne ?
Concrètement, il a fait l’objet d’un arrêté administratif qui l’a suspendu de ses fonctions. La municipalité a quatre mois pour le convoquer à un rendez-vous disciplinaire au cours duquel ils feront état des reproches dont ils se prévalent. Pour le moment, il n’a pas été véritablement informé de ce qui lui était reproché. Il a reçu un arrêté qui est motivé, ainsi un certain nombre de reproches sont faits, mais il n’a pas pu échanger de manière contradictoire avec son administration. Il attend d’avoir accès à son dossier administratif pour savoir ce qu’on lui reproche. Aujourd’hui, il est domicilié à Paris avec sa femme et ses enfants. Il peut toujours faire un recours administratif qui conteste ce qui lui est reproché ou pas.
Qu’est-ce qui motive cet arrêté ?
C’est un peu flou. Cet arrêté liste un certain nombre de récriminations. La mairie dit par exemple qu’il n’a pas eu les compétences pour exercer son emploi, alors qu’il a exercé son emploi pendant de nombreux mois et qu’il a reçu le satisfecit de l’ensemble de ses interlocuteurs et de ses employeurs. On m’a transmis un message de la maire qui le félicitait pour le travail qu’il effectuait. Des syndicalistes, sur Radio Péyi, ont dit qu’il était un bon DRH et qu’il réglait beaucoup de problèmes. Il y avait un travail de collaboration qui se faisait avec la maire. À partir du moment où ils ont vu qu’ils ne pouvaient pas le garder compte tenu de son casier judiciaire, des problèmes de compétence ont émergé. Il faut rappeler que ce n’est pas un faussaire, il a vraiment des diplômes et une expérience. Il a fait son travail avec une grande rigueur et une certaine expérience.
La mairie dit avoir déposé une plainte. Qu’en est-il ?
J’ai rédigé un courrier à l’attention du procureur de la République de Cayenne pour expliquer que mon client se tenait à disposition des enquêteurs s’il devait y avoir des suites à cette plainte.
Votre client a été entendu par un service d’enquête ?
Non, aucune nouvelle du service d’enquête et nous n’avons eu aucun débat contradictoire avec son administration sur les faits qui lui étaient reprochés. Il a juste reçu cet arrêté, a été suspendu, et a été invité à quitter les lieux sans pouvoir s’expliquer.
La mairie dit avoir reçu le casier judiciaire de M. D. tardivement. Vous expliquez que son bulletin n°3 a été transmis lors de son recrutement… Qui dit vrai ?
C’est une grande confusion. Je n’étais pas là le jour de la conférence de presse, mais il faut bien comprendre une chose, c’est que le casier judiciaire n°1 est accessible uniquement aux magistrats. Le casier judiciaire n°2 peut quant à lui seulement être demandée par l’administration. Il y a ensuite le casier judiciaire n°3, qu’il est possible de demander à l’état civil. Les mentions du casier judiciaire peuvent être différentes en fonction de ces niveaux. M. D. a donc seulement pu transférer son casier judiciaire n°3, dans lequel il n’y a aucune mention. Seul son casier judiciaire n°2 fait mention d’un certain nombre d’infractions. C’est là qu’ils se sont aperçus que mon client avait déjà été condamné pour « faux et usage de faux ». Est-ce qu’on peut avoir un casier judiciaire n°2 lorsqu’on est DRH d’une municipalité comme Cayenne ? Il y a une déontologie à respecter, donc c’est peut-être ça qui a justifié sa suspension. Ce qui est vrai, c’est qu’il n’est pas de nationalité française et qu’il a présenté une pièce d’identité française quand il était candidat. C’est quelque chose qu’il a fait et qu’il n’aurait pas dû faire.
Quid de sa situation vis-à-vis d’Haïti ?
De ce qu’il me dit, mon client ne connaît pas Haïti. Il se trouve qu’il est né à Haïti, mais la seule fois qu’il y est allé, c’était pour enterrer son père. Il a toujours vécu en Guyane française ou en métropole. Il n’a aucun rapport avec Haïti, n’a jamais été mis en cause dans une procédure pénale en Haïti et n’a jamais été poursuivi en Haïti. Je ne sais pas qui a lancé cette rumeur, mais elle est inexacte. Je m’inscris en faux par rapport à ça. La question de fond, c’est la discrimination des Haïtiens dans la société Guyanaise. Certains se sentent obligés de se présenter comme français, alors qu’ils ont un titre de séjour qui ne leur aurait pas interdit de se porter candidat. C’est une problématique plus large qui a conduit mon client a présenté une pièce d’identité française.