Deux jeunes hommes de 19 ans et 21 ans ont écopé de 7 ans de prison ferme avec mandat de dépôt ce vendredi 17 mars en comparution immédiate. Ils étaient poursuivis pour une longue série de vols avec arme commis dans les libres-services Cayennais entre décembre 2022 et mars 2023.
Froide ambiance dans la salle d’audience des comparutions immédiates du tribunal du Larivot ce vendredi après-midi. Près d’une dizaine de représentants de libres-services sont assis, face aux juges. Ils prêtent l’oreille, attentivement, à la longue liste de faits énumérés par la présidente de l’audience et à la traduction de l’interprète.
Sur le rôle de l’audience, 14 vols aggravés, commis entre le 18 décembre 2022 et le 11 mars 2023, s’affichent sous l’identité du plus grand, en taille, des deux prévenus. L’équipe ciblait systématiquement des libres-services de la communauté chinoise. Pas moins de 10 représentants de ces petits commerces ont déposé plainte et se sont constitués partie civile.
Joshua K., né le 21 avril 2003 à Saint-Laurent du Maroni, est présenté comme le « leader » du groupe. Au cours des braquages auxquels il a pris part, il était accompagné d’un mineur, également interpellé, ou alors de Marvin A., un jeune de Sinnamary âgé de 21 ans.
Au fil de cette série de vols avec arme, débutée à la mi-décembre, l’équipe de braqueurs a « pris de plus en plus la confiance », souligne la juge qui préside l’audience. Preuve en est, un libre-service de la route de la Madeleine (libre-service Feng) qui se trouve à une vingtaine de mètres de la caserne de gendarmerie éponyme, avait été ciblé le 27 janvier pour un préjudice estimé à 4 000 euros. Les agresseurs étaient montés sur la caisse en présence de la femme du gérant. Ce dernier, président de l’association chinoise Jian Zhe Hu , est le fils du commerçant tué par arme à feu dans son 8 à Huit à Rémire-Montjoly le 29 août 2022. Un meurtre qui avait suscité l’émoi et l’indignation dans toute la Guyane.
Braquage du libre-service Feng, le 27 janvier peu avant 20 h.
Coup de marteau
D’autres commerces, comme un libre-service de l’avenue des Flamboyants, ont été braqués à deux reprises par Joshua K.. Dans ce magasin, il était accompagné de Marvin A. lors du premier vol avec arme, le 26 décembre 2022 à 20 h 30. Avant de revenir, seul, le 11 mars 2023 à 16 h. Préjudice pour ces deux « coups » : 350 euros, puis 100 euros. Dans un autre libre-service de la Madeleine qui fait face à une station-service, Joshua K. et Marvin A. ont mis la main sur pas moins de 2000 tickets restaurants.
« Dans ce dossier-là, ce n’est pas habituel, les malfrats ont porté un coup à la victime », souligne la présidente de l’audience. Un coup de crosse asséné sur la tête du gérant, assis sans rien faire devant son commerce. « Il ne nous a pas vu venir », félicite sinistrement Joshua K.. Parmi les derniers faits d’arme de la bande, on retrouve le braquage du 8 à Huit Calimbe, commis le samedi 4 mars à 8 h 50. Accompagné du mineur de la bande, Joshua K. a cette fois asséné un coup de marteau dans les jambes du caissier.
« Pourquoi vous avez fait ça ? » questionne la présidente.
« Je l’avais déjà braqué, je suis revenu, j’avais peur qu’il me reconnaisse. » répond Joshua K., sans trembler.
« Vous aviez des cagoules de toute façon . » interpelle la juge.
En « temps normal», les braqueurs utilisaient une arme, chargée, pour parvenir à leurs fins.
Terreur sur la ville
C’est l’identification et le croisement des images issues de la vidéosurveillance et les reconnaissances sur planches photographiques qui ont permis aux enquêteurs de mettre un point final à cette série de vols qui s’annonçait sans fin. Une information anonyme a entraîné l’identification formelle de Joshua K.. Ce dernier, déjà sous le coup de trois contrôles judiciaires, dont un du juge des enfants pour « homicide involontaire et vol aggravé », éteignait systématiquement son téléphone avant de passer à l’acte.
Dans son domicile, les enquêteurs ont placé sous scellé 55 preuves, dont des cagoules et des vêtements utilisés lors des vols à main armée. Le jeune homme faisait partie d’une bande, la B18, lorsqu’il était mineur. Identifié par la suite, son comparse majeur, Marvin A., dit s’être rendu à Cayenne en vacances. Déjà condamné pour des vols avec effraction, il a passé huit mois en prison l’an passé, en 2022.
« Ils ont semé la terreur sur la ville pour satisfaire des petits plaisirs immédiats. Toutes les victimes ont exprimé la peur qu’elles ressentent aujourd’hui dans l’exercice de leur profession et la teneur de leur commerce. » fait valoir la substitute du procureur. Pour le parquet, 3 épisodes de violences ont été marquants au cours de ces vols (le coup de crosse sur la tête d’une des victimes, le coup de marteau et le pointage d’une arme en direction d’un témoin d’un vol).
Une « vagues de faits criminels » pour lesquels ces deux jeunes hommes auraient pu « être présentés devant une cour d’assises où ils auraient encouru une peine de 20 ans d’emprisonnement. » souligne la substitut. Sur les 10 années de prison encourues en correctionnelle pour les qualifications retenues, la parquetière en a demandé 7 pour Joshua K., contre 5 pour Marvin A.
« Délits compulsifs »
« Si les forces de l’ordre n’étaient pas intervenues, je pense qu’ils ne se seraient pas arrêtés. » concède l’avocate des deux prévenus. Fait rare, la robe noire avait déjà défendu un des deux, Joshua K., dans une affaire d’actes de torture et de barbarie devant la Cour d’assises. Le jeune mineur d’alors était cette fois dans les parties civiles. Sa belle-mère avait écopé de 18 ans de réclusion criminelle, selon l’avocate.
« Est-ce qu’il y a un lien entre la volonté de créer la peur chez ces personnes agressées et cette peur, la terreur que vous-même avez connu enfant ? » demande-t-elle à Joshua K.. Le jeune homme faiblit, pour la première fois à l’audience, baissant le regard. Une preuve d’humanité pour sa défense, qui assure que ces garçons ont « autre chose à apporter à la Guyane » que des « délits compulsifs ».
Après avoir écouté les réquisitions du parquet et la défense, le tribunal a délibéré pendant près d’une heure. Les juges ont décidé de ne pas « distinguer les peines » infligées à Joshua K. et Marvin A.. Ces derniers écopent tous deux de 7 ans de prison ferme avec mandat de dépôt. Ils sont – solidairement – déclarés entièrement responsables des dommages et intérêts accordés aux parties civiles, qui grimpent à près de 15 000 euros pour le seul préjudice matériel.
« Ce qu’on demande, c’est de ne plus être braqué » a réclamé une des parties civiles à la barre du tribunal. Le dernier de la bande, un mineur, répondra plus tard de ses actes devant un juge des enfants.
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