Le 15 mars, un projet éducatif intitulé « Respectez les filles » a invité les élèves du lycée public Sizenando Silveira, à Recife, la capitale de l’État de Pernambuco, à réfléchir sur les questions de genre et les droits des femmes. Dix jours plus tard, l’ambiance était toute autre.
Au moins une centaine d’élèves se tenaient par la main, formant une chaîne humaine devant les grilles de l’école pour protester contre l’impunité des enseignants et du personnel qui, selon eux, avaient harcelé sexuellement des élèves adolescentes. Le silence a été rompu après la création d’un compte anonyme Instagram nommé @ex.posed.sizenando, qui a rapidement reçu des dizaines d’accusations différentes contre le personnel, certaines de ces accusations remontaient jusqu’à 2015. Au moins deux enseignants, un membre du personnel de l’école et un ancien directeur d’école ont été désignés comme les harceleurs.
Le cas le plus récent a eu lieu juste après les activités du projet « Respectez les filles » . Selon deux élèves, un professeur de mathématiques les a approchés et leur a demandé si elles avaient l’habitude de « monnayer leurs services », car cela l’intéresserait. Effrayées, les adolescentes ont immédiatement signalé le harceleur à la direction de l’école. Mais c’est la réaction du conseil d’administration qui les a vraiment exaspérés. Selon les plaintes publiées sur le profil Instagram et confirmées par les élèves qui ont parlé témoigné lors de la manifestation, la commission scolaire a fait pression sur les filles pour qu’elles abandonnent les plaintes. L’effet a été inverse : la nouvelle s’est répandue dans les couloirs de l’école et le débat s’est terminé sur les réseaux sociaux.
Le 23 mars, deux jours après la création du profil anonyme, le compte Instagram comptait déjà 1 620 abonnés. Plusieurs commentaires ont mentionné la pratique consistant à faire disparaître les plaintes et à intimider les étudiants qui réclamaient des sanctions pour leurs harceleurs. Deux jours plus tard, les élèves manifestaient devant l’école. Les parents d’élèves se sont joints à eux accompagnés de représentants de l’Union brésilienne des élèves du secondaire (UBes) et de membres du Syndicat des travailleurs de l’éducation de l’État de Pernambuco (Sintepe).
Lors d’une réunion, les élèves ont fait état des difficultés de dialogue avec la commission scolaire et les situations d’abus et de harcèlement qu’ils ont également subis. À la fin de cette réunion, les représentants du conseil scolaire et de la direction régionale de l’éducation ont convenu d’enquêter sur les plaintes et de créer une cellule d’écoute pour les recueillir . Un comité d’étudiants, accompagné d’un membre du personnel, s’est rendu dans les salles de classe pour expliquer ce qui avait été convenu. Satisfaits de cet accord les étudiants ont désactivé le profil Instagram dénonçant les abus.
En plus de cet accord, qui aurait dû apaiser les tensions, la parlementaire Carol Vergolino qui préside la Commission des droits de l’homme de l’Assemblée législative a déclaré qu’elle demanderait une audience avec le secrétaire à l’Éducation pour exiger une enquête officielle sur toutes les allégations de harcèlement et la négligence de la direction de l’école.
En réponse le Département d’État indique avoir rencontré la semaine dernière les familles des élèves impliqués dans le cas présumé de harcèlement lors d’une réunion, à laquelle participait également l’enseignant l’auteur présumé des faits.
Cependant de son côté, comme une ultime provocation, la commission scolaire du lycée Sizenando Silveira a porté plainte contre le profil Instagram pour calomnie et diffamation. L’affaire fera l’objet d’une enquête par la police civile de Pernambuco.