Les planètes s’alignent pour Lova Jah. L’artiste Rouranais célèbre ses dix ans de carrière et sa quarantième bougie. L’âge de la raison.
Bon anniversaire ! 40 ans ….
Je suis bien content d’atteindre cet âge-là. On se dit toujours qu’on veut voir nos enfants grandir. J’ai deux filles âgées de 10 ans et 1 an et demi et jusqu’à aujourd’hui je me suis toujours laissé guider par des choix divins, par mes inspirations. Je suis bien content de ce que ça a donné. J’ai envie de dire que 40 ans plus 10 ans de carrière musicale, ça fait quasiment 50 ans de maturité (rires). La musique m’apporte beaucoup dans cette société.
Dans ta carrière musicale, l’amour de la Guyane a été un fil conducteur ?
Totalement, je pense qu’il faut s’aimer soi-même avant d’aimer les autres. L’estime que j’ai de moi-même m’a amené à avoir de l’estime pour la Guyane, la musique m’a permis d’avoir cette reconnaissance, cette force de fédérer. Je me sens pleinement Guyanais, ce qui me permet d’évoluer, en me disant que je suis déjà validé au péyi. Le message est clair et les gens l’ont bien accueilli, à ma grande surprise. Aujourd’hui, j’espère être un messager au-delà de nos frontières, avec les mêmes messages que ceux que je transmets en Guyane.
UN ÉCHANGE DE BONS PROCÉDÉS
Quel est ton programme pour les grandes vacances ?
J’ai la chance de pouvoir bosser à Guyane la 1ère depuis 8 ans maintenant. Je fais deux mois chaque année derrière le micro. Je sens qu’il y a une certaine forme de reconnaissance des auditeurs et auditrices qui fait que la confiance qui m’est accordée est renouvelée. Je fais mon maximum pour le leur rendre. D’ailleurs, en radio, je retrouve la proximité que j’ai avec mes auditeurs me rappelle celle que j’ai avec mon public. Je pense que c’est un échange de bons procédés. En ce qui concerne la programmation musicale pour ces vacances, je suis content de savoir qu’il y a de plus en plus d’animations en Guyane. Cela dit, c’est dommage qu’il y ait plus de festivités que de choses sérieuses.
D’un autre côté, toute festivité mérite une organisation, et maintenant on voit que les festivals se multiplient et que les associations sont bien structurées. Je pense aux Boom Jam Days. Pour un gars comme Didi Youth qui vient du ghetto comme moi, savoir qu’un jeune DJ qui est passé par tous les préjudices et les a priori arrive à faire un festival au stade Edmard-Lama [Rémire-Montjoly] avec un plateau intergénérationnel, c’est génial. Est-ce que je vais participer à l’ensemble des festivals ? Je ne pense pas, car je ne peux plus me retrouver dans le public quand je vais dans ce genre d’événements. Ça perd un peu de son charme… 40 ans, c’est l’âge de la raison.
Lova-Jah-est-un-artiste-qui-incarne-la-fusion-entre-la-tradition-et-le-reggae.
Tu as un public intergénérationnel ?
Je prône la musique consciente. J’estime ne pas avoir une « voix ». Je ne suis pas interprète, j’écris mes textes et je veux mettre en avant des messages conscients, y compris dans la musique d’ambiance. Dans cette dernière, je parle souvent du tourisme en Guyane. Pour les autres titres, je parle de morale, d’expérience… C’est de la musique consciente inspirée du reggae, une musique intergénérationnelle. Je pensais toucher un publique conscient, mais je me rends compte que je traverse les générations. La Gwiyann Bel se retrouve chanté dans des écoles par exemple. Ce n’était pas voulu, mais comment refuser ça ?
Une forme de reconnaissance ?
Je sais que toute chose est éphémère. Donc je profite un max parce qu’à n’importe quel moment l’inspiration, l’envie d’écrire ou l’envie de chanter peuvent me passer. Je ne veux pas que ça me coupe l’herbe sous le pied.
L’animation radio pourrait être une porte de sortie ?
Avant, j’étais surveillant de prison, je ne savais pas ce que j’allais faire. La musique m’est tombée dessus. Pour la radio, je me souviens qu’en 2014, Rudy Icaré m’avait invité aux côtés d’Orlane Jadfard pour l’émission du 31 décembre. Ils ont trouvé que j’étais un bon métronome dans l’émission, et finalement Rudy m’a dit qu’il allait me rappeler. Les vacances sont arrivées et j’ai eu un essai au mois de juillet, en 2015. Après 15 jours, ils m’ont gardé en me demandant de faire quelques changements. Je parlais notamment trop le créole, il fallait mettre un peu plus de français. En août, on m’a dit : 70% créole et 30% français. Il y a eu très rapidement cette affinité avec le public, qui se rend compte que la voix qu’il écoute sur les CD est la même que celle en radio. Je suis comme un oiseau du péyi, un pikolet. Le bon dieu me met une corde à mon arc, donc j’essaie de me perfectionner et d’apporter de la nouveauté. Je n’aime pas la monotonie. Pour le moment ça fonctionne, donc c’est cool.
« A L’ÉPOQUE, ON NE NOUS APPRENAIT PAS LES MUSIQUES CRÉOLES »
Compliqué, de vivre de la musique ?
Le seul bémol qu’il y a en Guyane, c’est que le succès ne rime pas avec la richesse. Chez nous, le succès nous rend riche personnellement, sur d’autres choses que sur du numéraire. Par contre, j’ai des partenaires qui m’aident dans le quotidien. J’utilise mon image et c’est d’ailleurs un des premiers conseils qu’on m’a prodigué. Dans les DOM-TOM, un artiste vit d’échanges de bons procédés, de son image. La plus grande reconnaissance que j’ai, c’est la reconnaissance scolaire.
À l’époque, on ne nous apprenait pas les musiques créoles. Si on n’écoutait pas les musiques de Tonton Jo [Joseph Mondésir, ndlr] dans nos familles, l’apprentissage n’était pas fait. Aujourd’hui, je rencontre des jeunes adolescents qui se rappellent de mes chansons, car j’étais venu dans leurs écoles pour chanter. Tout plaisir est à partager. Je veux montrer aux gens qu’on peut vivre simplement. Étant donné que je suis un messager et que j’ai des messages conscients à véhiculer, maintenant je veux juste trouver un moyen de le faire différemment. Pour ne pas devenir un artiste commercial et faire de la musique censée plaire à tout le monde. Je veux juste fidéliser les gens autour de ce que j’ai déjà fait.
La politique, une suite logique ?
Pour ce qui concerne la municipalité et les collectivités, on oublie selon moi une loi fondamentale. Un maire est censé créer une équipe, c’est un manager général qui doit mettre en place des personnes qualifiées et compétentes pour que des idées communes prennent forme. Ces idées communes sont emmenées par le peuple. A Roura, je serai le premier trait d’union, pour mettre en place ce qui manque dans la commune. Il faut qu’on trouve des solutions.
On voit dans le fonctionnement du système français qu’il y a des explications derrière les changements de gouvernances. L’engagement auprès de la population n’a pas été respecté. Ce que je veux, c’est créer une équipe. Il faut un renouveau dans la vision politique. Je gagnerai ce combat-là si je me présente à la mairie de Roura. On va me dire que je suis trop jeune, mais la première priorité est de ramener les habitants vers le scrutin, et je pense que ce sera le cas si je fais acte de candidature. Aujourd’hui, c’est un projet, il faut que j’ai une équipe derrière. Mais le 26, c’est mon numéro et les prochaines élections municipales tombent en 2026. C’est un signe ! Je pense qu’on peut apporter un renouveau politique en étant sincère… En ayant de l’eau dans son vin tout en continuant à boire du vin.
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