Alors que les deux bébés brûlés, Lehyann et Lyan-Hakim, suivent toujours des soins, la mère de ce dernier a accepté de revenir sur cette tragique journée du mercredi 14 juin.
Vêtu de son t-shirt bleu roi à motifs et de son petit short beige, Lyan-Hakim va tous les jours à la crèche « Bébés d’Amours », du lundi au vendredi, de 8 heures à 15 heures. Stanya, sa maman, déborde toujours un peu, alors il arrive vers 8 h 10. « De toute façon, c’est noté sur un petit bloc-notes quand il arrive et repart », ajoute Stanya.
Ce jour-là, Lyan-Hakim est de « très bonne humeur, se souvient-elle. À tel point que je me souviens avoir dit à ma mère que je n’avais pas envie de le déposer à la crèche. »
12 h 43
Stanya reçoit un appel de la présidente de la crèche : « Elle me dit : “Bonjour, on ne pourra pas garder Lyan-Hakim jusqu’à 15 h 30 comme tous les mercredis parce qu’on a un souci d’effectif.” Ok, on arrive ». Encore au travail et sans se poser plus de questions, Stanya appelle sa mère. En effet, cette dernière récupère son petit-fils tous les après-midi à la crèche.
Une dizaine de minutes plus tard, la grand-mère arrive à la crèche. Elle est accueillie pas la présidente de l’association, Oumie Mariéma Bouchet, qui la remercie d’être venue récupérer le bébé avant l’heure. Alors qu’elle entre dans l’établissement, une des animatrices se rend au dortoir, tout au fond. « Mais généralement, ils ne sont pas dans le dortoir quand on va les récupérer. Déjà là, il y a un souci : on l’a isolé seul dans le dortoir« , analyse Stanya après description de la scène par la grand-mère.
Lyan-Hakim est remis dans les bras de sa mamie, encore vêtue de son petit t-shirt bleu roi et son short beige. Il est calme et ne pleure pas, rien ne laisse présager la suite. Sa mamie est interpellée par le fait qu’il ne porte pas ses vêtements de rechange prévus lorsque les bébés sont rafraîchis.
« Les médecins m’ont expliqué que s’il ne pleurait pas, c’était parce qu’il avait tellement mal qu’il ne réagissait plus », relate Stanya.
13 h 15
Lyan-Hakim est installé dans son siège auto. Arrivé au domicile, son grand-frère de 14 ans interpelle leur grand-mère : « Tu as vu mamie, Lyan-Hakim a transpiré, son dos est mouillé. » C’est tout naturellement que cette dernière décide de changer le petit. Alors qu’elle retire son t-shirt bleu roi à motif, et découvre, non sans surprise, son petit dos « tout rouge et recouvert d’énormes cloques ».
Le grand-frère, témoin de la scène, appelle Stanya en visio, paniqué : « Maman, regarde son dos ! ». La maman ne cherche pas à comprendre, elle raccroche et rappelle la crèche.
13 h 20 :
« Il y a un problème, vous m’avez demandé de récupérer mon fils, je suis dans l’incompréhension, on me cache quelque chose. Mon fils est brûlé !« , dit Stanya à la présidente de l’association gestionnaire de la crèche. « Au début, dans la colère, je n’ai pas su interpréter, mais j’ai l’impression qu’elle n’était même pas au courant », se souvient-elle.
Stanya poursuit le récit de l’appel avec la gestionnaire : « Il y a eu un blanc et elle m’a dit de lui envoyer des photos et d’appeler les pompiers. » Dans ce court laps de temps, plusieurs appels téléphoniques entre Stanya, la grand-mère et la crèche sont passés.
Alors que la mamie de Lyan-Hakim appelle les pompiers, ces derniers lui expliquent qu’ils ne peuvent pas venir. Le conseil suivant est prodigué : se rendre directement aux urgences.
« Quand je suis arrivée en pleurs à la maison, Lyan-Hakim ne pleurait pas, il était tranquille dans les bras de sa grand-mère en train de me regarder en mode : “Mais qu’est-ce qu’elle a maman ?” Il avait certainement déjà tellement pleuré qu’il n’avait plus aucunes réactions. »
L’hôpital
La grand-mère, après avoir appelé les pompiers, a appelé l’hôpital de Cayenne pour prévenir son arrivée en trombe. « Les médecins se sont dits que c’était une blague, car ils venaient d’en accueillir un premier… », relate Stanya.
Lorsque Lyan-Hakim arrive aux urgences, accompagné de sa mère, sa grand-mère et son grand-frère, une famille se tourne vers eux : « Ne me dîtes pas que vous venez de la même crèche ? ».
– Si, on vient de la crèche Bébés d’Amours, répond Stanya.
C’est à ce moment qu’elle voit alors un deuxième bébé brûlé. Ce bébé, c’est Lehyann : « Je le vois tous les matins à la crèche. Je l’ai reconnu et j’ai craqué », confie-t-elle.
« Dans la précipitation, j’ai même pensé à prendre un sac, prendre ma carte vital, ma mutuelle, j’ai même préparé des biberons car je me suis dit qu’il aurait peut-être faim le pauvre. »
Lyan-Hakim est donc pris en charge. Manipulé par les médecins qui ont posé des perfusions pour l’hydrater et lui administrer des tranquillisants contre la douleur, le bébé de neuf mois a ressenti la douleur. « Il pleurait, il était sur le dos en plus. Il était très agité. On était au moins 4 pour le tenir. »
L’évacuation sanitaire
Alors que Stanya craque, elle est reçue par un médecin qui lui explique toutes les mesures d’urgence plausibles : évasan, sonde urinaire pour l’hydratation, des risques que la brûlure soit profonde, la surface de la blessure, des greffes, etc. « Tous ces termes-là m’ont fait paniquer », partage-t-elle.
Vers 22 heures, un médecin de garde explique à Stanya qu’ils ont gratté toutes les peaux brûlées pour mieux analyser l’étendue de la blessure. À ce moment-là, selon lui, son état ne nécessite pas forcément une evasan. Mais, finalement, c’est le lendemain, jeudi 15 juin, le médecin qui a pris le relais insiste pour que Lyan-Hakim soit evasané vers l’hôpital Armand Trousseau à Paris.
Avant le départ, Stanya va porter plainte, au risque de rater son avion. Le faire avant son départ était important pour elle.
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