Malgré un changement de présidence en juin 2022, l’association guyanaise de formation en travail social est accusée des mêmes maux depuis près de deux ans. L’institut de formation des travailleurs sociaux, dont elle assure la gestion, a perdu la main sur les finances, ce qui, outre une situation conflictuelle, laisse place à des soupçons de détournement de fonds publics.
Le torchon brûle entre l’Institut Régional de Développement du Travail Social et son organisme gestionnaire. Créée pour gérer les fonds attribués par la CTG à la formation professionnelle, l’association guyanaise de formation en travail social (AGFTS) s’est disjointe du siège de l’IRDTS et s’accapare depuis près de deux ans la gestion des finances.
Une crise de confiance qui empire et empiète sur les conditions de travail des quelque 29 salariés permanents et 150 intervenants vacataires de l’IRDTS, dont le siège est basé à l’entrée du quartier Mont-Lucas, à Cayenne.
Le 30 juin 2022, après démission de l’ancienne présidente de l’AGFTS Yolani Horth, Gérard Faubert a été nommé à la tête de l’association. « La présidente de l’époque était salariée de la CTG, ce qui pouvait créer une situation de conflit d’intérêt, on a séparé les deux niveaux de responsabilité », explique cet ancien président du Conseil d’Administration de la CGSS.
Une direction ostracisée
De mal en pis, la situation n’a pourtant pas évolué. Le nouveau président est qualifié par plusieurs salariés de « dictateur ». Comprendre : Gérard Faubert aurait pérennisé un mode de gestion jugé unilatéral et ostracisant pour la direction de l’IRDTS. En somme, depuis deux mandats désormais, Colette Galiby, occupante du plus haut poste de l’institut, n’a plus accès aux comptes bancaires de l’établissement et n’aurait, à ce jour, « plus aucune délégation », selon une source interne.
Dans la dernière convention de fonctionnement en date, la collectivité territoriale de Guyane a accordé une subvention, destinée au budget de financement du programme de formation 2022-2023 de l’IRDTS, d’un montant de 1 811 400 euros. Ce montant est censé faire tourner à plein régime un établissement qui forme chaque année près de 200 futurs travailleurs sociaux, chaque année.
Mais l’équilibre financier de l’IRDTS est fragile. Après un contrôle de gestion au début de l’année 2021, la CTG invoquait « une situation à éclaircir » entre le « statut de l’association et l’institut de formation ». « La CTG ne finance que les dépenses liées au fonctionnement de l’IRDTS » concluait une lettre adressée à la directrice, rappelant les « résultats déficitaires » et un « déficit structurel observé » à l’IRDTS. Deux ans plus tard, lumière n’a toujours pas été faite sur cette rupture entre l’AGFTS et l’IRDTS.
« Yolani Horth a utilisé les fonds pour louer un local au profit de l’AGFTS »
Parmi les exemples illustrant la situation actuelle, prenons celui du siège de l’AGFTS. Auparavant implanté dans l’école, il a été délocalisé en 2022 au 15 rue Gabriel Devèze, dans le centre-ville de Cayenne. La propriétaire des lieux, une ancienne salariée de l’IRDTS, s’est vu attribuer une subvention pour réaliser les travaux, moyennant quoi elle perçoit 2000 euros mensuels, qui viennent s’ajouter à un loyer de 1120 euros. La justice en a été informée.
Dans une lettre adressée au procureur de la République le 22 novembre 2021 [Samuel Finielz était procureur, à l’époque], Colette Galibi annonçait que la présidente de l’AGFTS [Yolani Horth] « avait rompu tout contact avec l’IRDTS », ce qui mettrait « en danger l’établissement, qui reçoit environ 200 étudiants et stagiaires, ainsi que le personnel qui travaille dans des conditions extrêmement dégradées ».
Et d’ajouter : « Yolani Horth a utilisé les fonds pour louer un local au profit de l’AGFTS, local situé chez un membre de l’AGFTS, alors qu’aucune décision n’a été validée par l’AG [Assemblée Générale], seul organe souverain […] De plus, elle a embauché un salarié qui n’a aucun lien avec l’IRDTS, qu’elle paie pourtant sur les fonds de la formation, destinés à l’IRDTS ».
300 000 euros se sont envolés
Un an plus tard, le procureur de la République, Yves Le Clair, a décidé de classer sans suite cette plainte émanant de la direction, en expliquant que « les faits ou les circonstances de la procédure n’ont pu être clairement établis par l’enquête ».
Entre-temps, une délégation de membre du CSE de l’IRDTS a été reçue à la CTG en novembre 2022. Après avoir pris en compte une nouvelle alerte, la CTG a dès lors demandé à l’AGFTS de rembourser les sommes prises à l’IRDTS, de dissocier les comptes bancaires et de redonner à la directrice de l’IRDTS l’accès à ces derniers. Deux mois après, en janvier 2023, Gérard Faubert révoquait l’expert-comptable et le commissaire aux comptes en charge des opérations financières.
D’après nos informations, l’IRDTS aurait perdu la main sur plus de 300 000 euros depuis que l’AGFTS se charge de la gestion des finances de l’institut. Interrogé, Gérard Faubert avance « une incompréhension sur la répartition des responsabilités ». Malgré les injonctions de la CTG, l’institut n’a toujours pas récupéré les sommes dues.
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