Lorsque vous prenez l’avion, il peut arriver que les bagages que vous avez enregistrés en soute vous soient restitués abimés ou qu’ils soient perdus. II faut savoir que, dans de telles situations, le droit a prévu un dispositif qui protège vos intérêts avec des solutions indemnitaires.
Patrick Lingibé, auteur de cet article publié dans notre édition hebdomadaire, est avocat, ancien bâtonnier de Guyane, mais aussi membre du Conseil national de l’aide juridique.
Quelles sont les deux conventions internationales de transport qui sont applicables ?
II faut savoir que le droit du transport aérien est régi par deux conventions internationales, signées à 70 ans d’intervalle, vers lesquelles il faudra donc se tourner si le bagage est perdu ou endommagé :
La convention internationale dite de Montréal de 1999, qui s’applique à un vol entre deux États qui l’ont ratifiée et à tous les vols des compagnies de I’Union européenne
La convention internationale dite de Varsovie de 1929, qui s’applique à un vol entre deux États qui n’ont pas ratifié la convention de Montréal ou à un vol entre deux États dont l’un seulement a ratifié la convention de Montréal.
Pour rappel, dans notre droit positif, il est rappelé que les conventions internationales régulièrement ratifiées ou approuvées par le Parlement ont, en application des dispositions de l’article 55 de la Constitution, « dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois ».
La convention internationale dite de Montréal pour l’unification de certaines règles relatives au transport aérien international signée à Montréal le 28 mai 1999 a été ratifiée pour la France par la loi n° 2003-380 du 24 avril 2003. Elle a été publiée au Journal Officiel du 22 juin 2004 par le décret n° 2004578 du 17 juin 2004.
Elle est donc en vigueur et entrée dans notre droit interne depuis le 23 juin 2004 . II convient d’indiquer que la convention de Montréal de 1999 a énoncé cinq principes présidant à son élaboration, dont celui de « la nécessité de moderniser et de refondre la Convention de Varsovie et les instruments connexes
Elle s’applique à tout transport international de passagers, de bagages et de marchandises effectué par aéronef, le transport international étant défini conventionnement comme « tout transport dans lequel, d’après les stipulations des parties, le point de départ et le point de destination, qu’il y ait ou non interruption de transport ou transbordement, sont situés soit sur le territoire de deux États parties, soit sur le territoire d’un autre État, même si cet État n’est pas un État partie. Le transport sans une telle escale entre deux points du territoire d’un seul État partie n’est pas considéré comme international ».
Cette convention a vocation à terme, au fur et à mesure de sa signature par l’ensemble des États, à remplacer celle de Varsovie, vieille de 93 ans à ce jour. À cet effet, son article 55 déclare qu’elle a une autorité juridique supérieure sur toutes les règles s’appliquant au transport international par voie aérienne, notamment celles prévues par la convention de Varsovie de 1929.
Pour information, 191 pays ont à ce jour signé la convention de Montréal. Sur ce point, il faut signaler que tous les États de I’Union Européenne ont adopté la Convention de Montréal. De plus, le règlement européen CE n° 889/2002 du Parlement européen et du Conseil du 13 mai 2002 modifiant le règlement (CE) n° 2027/97 du Conseil relatif à la responsabilité des transporteurs aériens en cas d’accident soumet tous les vols effectués par les compagnies européennes à la Convention de Montréal, y compris ceux ne répondant pas à la définition du transport international et ceux auxquels la Convention de Varsovie s’applique normalement.
Pour information, le Brésil a signé la convention de Montréal le 3 août 1999 pour une entrée en vigueur le 18 juillet 2006. Elle est applicable par le Guyana depuis le 21 février 2015. Cependant, il est à noter que le Suriname ne l’a pas encore signée et que ce pays est toujours soumis à la convention de Varsovie, moins intéressante pour l’indemnisation du passager aérien.
La convention internationale dite de Varsovie pour l’unification de certaines règles relatives au transport aérien international a été signée à Varsovie le 12 octobre 1929. Elle a été ratifiée par la France le 15 novembre 1932 pour une entrée en vigueur à compter du 12 février 1933. Elle a été modifiée à plusieurs reprises, notamment par le protocole signé à La Haye le 28 septembre 1955, ce dernier ayant été ratifié le 19 mai 1959 et appliqué à compter du 1 er aout 1963.
La compagnie aérienne est responsable
Les plafonds d’indemnisation sont fixés en unités de compte international. Convention internationale et droit international obligent, le système indemnitaire retenu est fixé par référence aux instruments financiers internationaux.
En effet, les plafonds d’indemnisation sont fixés en unités de compte du Fonds Monétaire International (FMI) que constituent les Droits de Tirage Spéciaux (DTS).
Depuis le 1er octobre 2016, la valeur du DTS repose sur un panier qui comprend les cinq monnaies que sont le dollar, l’euro, le renminbi, le yen et la livre sterling.
Ces droits de tirage spéciaux variant donc en fonction des fluctuations monétaires, leurs montants peuvent varier. Ainsi, suivant une estimation arrêtée en juin 2022, ces DTS peuvent s’élever à plus de 1 000 DTS par passager, représentant soit environ 1 268€ par passager, pour la convention de Montréal de 1999, conformément aux dispositions conventionnelles du 2 de son article 22.
17 DTS par kilo de bagage, représentant environ 21,50 € par kilo , pour la convention de Varsovie de 1929, conformément aux dispositions conventionnelles du 2.a) de son article 22.
II faut savoir que la compagnie aérienne est responsable en cas de retard ou de perte des bagages enregistrés du passager. Vous devez le signaler au service « bagages » de l’aéroport d’arrivée.
Ce service doit établir une fiche de réclamation et vous remettre ensuite un récépissé au passager indiquant les références du vol concerné.
Si le bagage est finalement retrouvé, la compagnie aérienne doit vous le livrer sans frais à l’adresse que vous avez mentionnée dans la réclamation.
Si le bagage n’est pas retrouvé au bout de trois semaines de recherches, le bagage est déclaré comme perdu. Dans ce cas, vous devez adresser à la compagnie aérienne concernée une demande d’indemnisation au plus vite.
En cas de bagages endommagés, si le dommage s’est produit pendant le transport aérien, depuis l’enregistrement du bagage jusqu’à sa livraison à l’arrivée, la compagnie aérienne empruntée est responsable.
Si vous constatez les dommages dès la réception des bagages enregistrés, il doit effectuer immédiatement une réclamation écrite auprès de la compagnie aérienne ou du service bagages de l’aéroport dans les sept jours qui suivent la date du transport aérien.
Délai de 14 à 21 jours
Cependant, si les bagages ont été égarés puis retrouvés endommagés, vous disposez de quatorze jours, selon la convention de Varsovie de 1929, ou de vingt-et-un jours, selon la convention de Montréal de 1999, à compter de leur réception, pour établir une réclamation.
Si la compagnie aérienne refuse de vous indemniser, vous pouvez opter pour une solution à l’amiable ou pour des démarches judiciaires.
Si vous souhaitez une résolution du litige à l’amiable, notamment pour des raisons de rapidité, vous pouvez déposer une réclamation en ligne auprès de la Direction Générale de l’Aviation Civile (DGAC) ou saisir le Médiateur Tourisme Voyage.
Toutefois, si ces démarches n’aboutissent pas, vous pouvez saisir la justice afin de demander des dommages et intérêts à hauteur du préjudice subi. La juridiction compétente dépend des sommes concernées.
– Pour un litige inférieur à 10 000€, les démarches se feront devant un juge spécialisé du tribunal judiciaire à savoir le juge des contentieux de la protection.
– Pour un litige supérieur à 10 000€,
Quelle compagnie européenne dois-je choisir pour une meilleure indemnisation ?
II est très clair que les dispositions de la convention de Montréal assurent une meilleure indemnisation des bagages perdus ou détériorés que celle offerte par la convention de Varsovie.
Vous auriez donc tout intérêt à choisir une compagnie aérienne d’un État ayant signé la convention de Montréal, cela en vue d’obtenir une meilleure indemnisation de vos bagages en cas de perte ou de détérioration, sauf pour vous à disposer d’une assurance personnelle particulière et complémentaire couvrant ce type de dommage en plus des garanties habituelles proposées par la compagnie défaillante.
Ainsi, dans une décision rendue le 17 mai 2018, dans une affaire Société Tunis Air (société tunisienne de l’air c/ Madame Z X, la cour d’appel de Paris a dû écarter la convention de Montréal invoquée par le passager dont les bagages avaient été très détériorés, au profit de la convention de Varsovie, cela au motif que la compagnie aérienne utilisée relevait d’un État n’ayant pas signé la convention de Montréal. Dans les circonstances de l’espèce, au lieu d’une base indemnitaire à 1 000 DTS, soit environ 1 206 € à l’époque, auquel il aurait eu droit si la convention de Montréal s’était appliquée, le passager malheureux a été indemnisé sur la base de la convention de Varsovie, soit 17 DTS, soit 20 € par kilo.
II faut savoir que vous disposez en tant que passager d’un délai de deux ans pour engager un recours en responsabilité à l’encontre de la compagnie aérienne ou devant les tribunaux conformément aux dispositions de l’article 35 la convention de Montréal ou 29 de la convention de Varsovie applicable.