Première adjointe au maire de Papaïchton, Sergina Telon, 32 ans, revient sur les attentes des élus du Haut-Maroni à l’heure de l’installation d’un conseil de la continuité et de l’égalité territoriale suite aux premières assises du désenclavement à Maripasoula.
Mini bio : Sergina Telon a grandi à Papaïchton. Elle a quitté la commune pour Maripasoula dès ses années Collège, Papaïchton ne disposant pas d’établissement secondaire à cette époque. Après des études à l’Université de Guyane, elle est désormais enseignante à l’école Charles Cazal. En Juin 2020, Sergina Telon est devenue la première femme élue première adjointe d’un maire dans le Haut-Maroni. Depuis juin 2021, elle siège aussi dans les rangs de l’opposition à la collectivité territoriale de Guyane.
D’où vient votre engagement politique ?
Pour être honnête, je ne pensais pas m’engager en politique. Je commentais les actualités et un beau jour Jules Deie [maire de Papaïchton] m’a proposé de l’accompagner durant sa deuxième mandature. J’ai sauté le pas pour m’inscrire dans sa liste au cours de la campagne. Je n’avais pas d’expérience politique. J’ai ensuite été approchée pendant l’élection de la CTG.
Quelle est votre délégation ?
C’est la délégation sociale et santé, mais aussi tout ce qui touche la commune lorsque le maire est absent.
C’est assez large…
Concernant la santé, il y a beaucoup à faire. Normalement, un nouveau centre de santé va bientôt voir le jour à Papaïchton. Ça a pris du retard en raison du permis de construire, il était prévu qu’on pose la première pierre en Juin-Juillet.
Ce serait une annexe du Centre Délocalisé de Prévention et de Soin de Maripasoula ?
Qui proposerait plus de services que le dispensaire de Papaïchton. Il y a deux médecins et un énorme turn-over, également au niveau des infirmier(e)s. À Loka, une convention avec le CHAR permet toutes les semaines qu’un médecin tienne une permanence. On peut parler de désert médical, car on n’a pas de spécialistes. Il faut se déplacer à Cayenne ou attendre les rendez-vous en cas de problèmes graves.
Quel regard portez-vous sur la représentation politique dans le Haut-Maroni au cours des assemblées plénières de la CTG ?
Peut-être qu’il faudrait plus de force pour se faire entendre. Mais la répartition des sièges dépend de la population. S’il fallait plus de personnes, on ne dirait pas non quand on connaît les problématiques du territoire. Dès que je n’ai pas d’autres obligations, je fais le déplacement (à la CTG, ndlr) car c’est nécessaire. Si on ne vient pas, on ne peut pas défendre quoi que ce soit. Maintenant, il faut reconnaître que quand on siège dans l’opposition, on se fait beaucoup moins entendre. Nous, les élus du Haut-Maroni, on aimerait que ça boost un peu plus sur tout ce qui est du ressort de la CTG. On a vu que la construction du lycée à Maripasoula avance, mais doucement. On espère que le calendrier sera respecté pour une ouverture à la rentrée 2023. Un lycée pour Maripasoula est plus que vital pour la population du Haut-Maroni. Quand des jeunes de 13-14-15 ans sont obligés de quitter leurs parents pour aller sur le littoral, ils vivent un dépaysement et ça ne se passe pas toujours bien. Au bout d’un an ou deux ans, certains choisissent de revenir, car ils ne supportent plus le climat. Ce sera plus que bénéfique. A chaque fois que je viens à Cayenne, il y a des jeunes du Haut-Maroni que je retrouve en pleurs. Ils ne sont pas forcément bien et on leur dit de ne pas lâcher… Je pense qu’ils sont aussi contents de voir que l’on s’intéresse à eux et qu’il y a ce lien.
Avec le recul, quelles sont les réalités politiques que vous avez pu observer au sein de la collectivité territoriale ?
On va dire que c’est un autre niveau politique. Je suis ravie d’apprendre plus de choses, qui peuvent être transposées dans nos collectivités locales.
La route Maripasoula-Papaïchton a-t-elle été projetée trop rapidement ?
On ne peut pas jeter la pierre à quiconque. Il fallait d’abord penser et réfléchir le tracé. Il y a eu des manquements que les services concernés essaient de rectifier. Les administrés ne sont pas contents de cette lenteur. On n’a pas d’aérodrome à Papaïchton, ni de pharmacie. Il faut automatiquement aller à Maripasoula. J’ai pu rencontrer le sous-préfet et la DGTM. Ils nous ont expliqué les problématiques liées à cette route. Même si on n’est pas totalement satisfait, on a pu avoir des réponses, la communication est fluide.
La route du désenclavement, introduite par le collectif Apachi au cours des assises* du désenclavement à Maripasoula, est-elle réalisable avant 2030 selon vous ?
C’est un projet ambitieux, mais il faut y croire. Sans ce désenclavement-là, nous resterons dans cette situation avec des enfants obligés de quitter le Haut-Maroni pour venir à Cayenne. C’est vraiment une souffrance pour la population du Haut-Maroni de ne pas pouvoir se déplacer comme sur le littoral. La liaison Maripasoula-Papaïchton est déjà compliquée en voiture… Je tiens toutefois à féliciter le collectif qui a mis ces assises en place. C’est une avancée par rapport à toutes les problématiques que nous avons. Les débats étaient ancrés sur la route du fleuve, mais on va dire que c’est un bon début. J’espère que ça ne restera pas juste une réunion.
La mairie de Papaïchton est impliquée dans le comité de pilotage qui va être installé le 25 août ?
Oui, notamment M. le Maire Jules Deie. J’espère que les services de l’Etat, qui avaient peut-être d’autres obligations au cours des assises en juillet, pourront être autour de la table au cours de cette réunion à Saint-Laurent du Maroni.
Le 8 juillet, un collectif de citoyens a réuni un parterre d’élus Guyanais au cours des premières assises du désenclavement à Maripasoula. Les municipalités dites du Fleuve et de l’intérieur de la Guyane étaient aussi représentées. À l’issue, une déclaration d’engagement a été proposée par le collectif Apachi (qui signifie « la route », « le chemin » en Aluku tongo). Cette déclaration instaure dans son premier point que le désenclavement total de l’intérieur de la Guyane doit passer par la création d’infrastructures terrestres entre Cayenne – Saül et Maripasoula et entre Papaïchton et Apatou (route du Fleuve). Les parties prenantes se sont engagées à tenir une nouvelle réunion pour installer un comité de pilotage. Le « conseil de la continuité et de l’égalité territoriale » devrait ainsi rassembler les aménageurs en charge de la mobilité le 25 août : la CCOG, la CCEG, la CTG, l’État, les communes enclavées et le collectif Apachi sont annoncés.
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