Au bord du bord. L’arrestation d’Élie Domota a mis le feu aux poudres hier après-midi en Guadeloupe. La séquence, filmée en direct par la chaîne de télévision Canal 10 et par des vidéos amateurs a provoqué colère et émotion. Les images, avec le t-shirt ensanglanté du leader indépendantiste du LKP ainsi que lorsqu’il demande à l’un des policiers qui le tient de « serrer moins fort » , car ça lui « fait mal », et le constrate avec le moment précédent l’arrestation où Elie Domota avançait les bras levés, précisant qu’il n’était « pas armé », ont entraîné une mobilisation vigoureuse de centaines de personnes. Si la pression est retombée en fin de soirée, cette image va rester comme marquante. L’occasion de vous faire re-découvrir l’interview exclusive qu’Élie Domota avait accordé à Mo News au début du mois de décembre. Ci-dessous ⤵️
Article paru le jeudi 9 décembre 2021 dans Mo News (n°39) :
La Guadeloupe toujours en eaux troubles. La crise se poursuit et la visite du ministre des outre-mer Sébastien Lecornu n’a pas permis d’apaiser les tensions. Au contraire, l’exigence du gouvernement de la reconnaissance par les élus et syndicalistes des « violences, dont des tentatives de meurtres contre les gendarmes et policiers » a coupé court aux discussions qui n’ont pu avoir lieu, malgré une rencontre entre Sébastien Lecornu et quelques représentants syndicaux dont Elie Domota lundi. Le ministre reparti, la crise perdure et les revendications, qui se sont élargies, sont plus que jamais d’actualité. Le pavé dans la marre jeté par Sébastien Lecornu qui a ouvert la voie à l’autonomie des îles, ne convainc pas Elie Domota. Le leader historique du LKP estime que l’autonomie n’est plus le sujet. Selon Elie Domota, qui répond en exclusivité en Guyane depuis la visite du ministre, aux questions de Mo News , la France n’a pas appliqué les directives européennes qui imposent déjà l’autonomie des régions. Pour Elie Domota désormais « la question de l’indépendance nationale, pour la Guadeloupe, la Martinique et la Guyane, est la seule solution ». Interview.
Pour Elie Domota, « la Guadeloupe, la Martinique et la Guyane doivent avoir le droit à disposer d’elles-mêmes »
Comment expliquer ce qui se passe depuis un peu plus de 15 jours maintenant en Guadeloupe ?
Depuis le 17 juillet, nous sommes mobilisés contre le pass sanitaire et l’obligation vaccinale. On demande l’ouverture de négociations. On a eu aucune réponse. On a devant nous une incompréhension totale. Nous avons manifesté pendant 4 mois dans le calme, nous avons été ignorés et méprisés. En fait, le pouvoir colonial nous démontre une nouvelle fois qu’il faut se mettre dans l’illégalité pour pouvoir espérer être entendu. Depuis le 15 novembre, nous avons les projecteurs braqués sur nous. Nous recevons des appels et des visites de journalistes venus de France et de l’Europe entière et la colonie nous a envoyé des forces armées pour nous réprimer et nous faire taire.
Les négociations n’ont pour l’heure (interview réalisée le vendredi 26 novembre au soir) pas été ouvertes…
C’est le mépris colonialiste et raciste. Ça veut dire « voilà ce que nous décidons à Paris. On en a rien à foutre. Et si vous n’êtes pas content c’est la cravache » . Ils ont interdit aux médecins de délivrer les médicaments par défaut de soin et manque d’oxygène. 514 morts en deux mois. C’est de leur faute. Nous avons le plus grand nombre de morts par habitant devant Haïti, la Jamaïque et Saint-Domingue. Est venu se greffer les problèmes sociaux qui persistent en Guadeloupe depuis des décennies en Guadeloupe et en Guyane. La seule chose que nous demandons c’est le début des négociations.
L’autonomie n’est pas une avancée ?
Vous savez pour moi, l’autonomie c’est un faux débat. C’est une directive de l’union européenne pour l’ensemble des états. La France c’est le dernier pays de ne pas avoir adopté l’autonomie. C’est une directive de l’union européenne. C’est plutôt une question de souveraineté et d’indépendance nationale. Il faut militer plus que jamais sur notre droit de disposer de nous-même. Si nous voulons nous émanciper, il faut clairement lancer le débat. Il ne s’agit pas de dire « la population n’est pas prête » . Il faut arrêter de penser que nos trois pays, la Guadeloupe, la Martinique et la Guyane seraient peuplés de sous-hommes qui ne seraient pas capables de disposer d’eux-mêmes !