Dans le rétro. Battu à la surprise générale aux élections de juin à la CTG, Rodolphe Alexandre n’en est pour autant à la retraite de la politique. L’ancien dirigeant de la Région puis de la Collectivité, est très présent sur les réseaux sociaux et veille à rappeler les actions qu’il avait engagé avec son équipe à la tête de la CTG. Lui sont notamment prêtées parfois des ambitions pour les prochaines législatives. Mo News a rencontré l’ancien président plus motivé que jamais pour faire avancer la Guyane. Interview intégrale (publiée le jeudi 2 décembre dans Mo News).
Comment avez-vous vécu cette période depuis votre défaite à la CTG ?
Nous l’avons vécu de façon sereine, apaisée. La démocratie a tranché. Nous avons certainement fait des erreurs et pas assez communiqué. Le Covid a joué également dans notre échec, puisque nous étions au pouvoir, malgré tout ce que nous avions pu faire. Aujourd’hui, nous jouons le rôle d’opposition. C’est un rôle de vigilance, de contrôle et de construction. En tout cas, c’est un rôle pour veiller sur l’héritage, notamment du programme pluriannuel d’investissements. La nouvelle maquette 2022-2027 est plus difficile et ouverte avec des réticences de l’Europe vis-à-vis des RUP (Région ultramarine périphériques). Nous devrons donc travailler ensemble pour faire avancer les choses.
Avez-vous trouvé vos marques en tant qu’opposition justement ?
Oui, nous avons un collaborateur. Bientôt un deuxième. Nous sommes 20 élus. Nous nous voyons et communiquons entre nous. Nous intervenons à bon escient. Nous avons parfois manifesté notre désapprobation en quittant la salle. Lors de la dernière assemblée, nous avons été pertinent. Ça visait à sanctuariser les 40 millions à rajouter aux 30 millions précédents. C’était 80 millions qu’on négociait. Il faut sanctuariser cet argent. C’est nous qui avions obtenu ça. Il faut que la majorité actuelle arrive à maintenir cet argent qui doit revenir à la Guyane. Il y a aussi la désensibilisation des emprunts toxiques. On aurait dû poser la question de cet emprunt. Il faut quand même rappeler que cet emprunt toxique ce n’est pas nous qui l’avons souscrit, mais c’était Antoine Karam, mais aujourd’hui, on est bien obligé de gérer ça. Nous avons attaqué l’Etat à l’époque parce qu’on n’avait pas donné toutes les données à la Région et après on avait négocié pour passer à la désensibilisation. Mais aujourd’hui, il faut gérer les compensations. Il faut gérer ce dossier avant le vote du budget et c’est capital.
Sur les 80 millions, certains expliquent qu’ils avaient été bloqués lorsque vous aviez, vous, fermés les lycées et instauré un bras de fer avec le préfet…
Oh non ! Franchement, c’est du cancan ça. Qu’on ai des rapports parfois frontaux entre la préfecture et la CTG, je ne pense pas qu’une personne décide au nom de l’Etat et du gouvernement. Moi j’ai vu Sébastien Lecornu à Paris juste après la défaite, lors d’une fameuse réunion à l’Assemblée nationale où l’on m’avait invité et j’avais échangé avec lui à ce moment là, et le principe était maintenu. Quelque soit nos rapports, un préfet ne peut pas décider qu’on ferme la cagnotte parce que je ne m’entends pas avec quelqu’un. La fermeture des collèges et lycées, j’assume. J’avais l’accord des élus. 17 maires sur 22 étaient présents ce jour-là et quelques temps après, la préfecture a reconnu qu’il fallait fermer les lycées et les collèges. Donc pour moi c’est un dérivatif. Maintenant, il faut cibler le dossier. C’est pas la première qu’on touche de telles sommes. Nous en avions reçu déjà avec Annick Girardin en 2019… C’est une compensation jusqu’au jour où le gouvernement aura sanctuarisé les dotations.
Vous parlez de « préserver l’héritage »… Jusqu’à présent Gabriel Serville poursuit tous les chantiers engagés…
Tant mieux. La Cogumer fait vivre 300 familles de pêcheurs. Le Frar se poursuit aussi. Nous avons travaillé dessus. Et puis il y a tous les chantiers colossaux en matière d’équipement : les routes, les pistes, le pont de Sinnamary, les casernes dont 3 sont largement avancés… il faut suivre ces chantiers pour démontrer aux Guyanais qu’il y a une majorité dans l’Histoire qui s’est investie, à travaillé pour l’amélioration du bien-être et porte cet héritage pour la Guyane.
Quelles sont vos relations avec Gabriel serville malgré quelques accrochages en plénière ?
Elles sont normales, du rôle de majorité et minorité. Maintenant d’hommes à hommes si il faut s’assoeir autour d’une table, j’ai pas d’hésitation. Du temps où j’étais président, j’ai moi-même invité les parlementaires pour le dossier du CHU. Je me bats pour mon pays. Je n’ai voulu aucun poste au niveau national pour toujours privilégié la Guyane.
Justement, ça vous intéresse un poste au niveau national ? Votre nom circule…
C’est vous qui le dites.. mon nom a toujours circulé. Mais je suis toujours resté en Guyane. Pour l’instant, aucune négociation. Je vais à Paris. On me rencontre, mais il n’y a aucun contact. La question c’est de savoir l’intérêt pour le territoire. On m’a reproché mes relations personnelles avec Nicolas Sarkozy et Emmanuel Macron. J’assume. Contrairement à Messieurs Othily et Elie Castor, qui sont mes mentors, je ne cherche pas l’affrontement. Avec ma majorité, on a réussi à rentrer à l’Elysée et à avoir des discussions avec l’Etat.Quand il a fallu faire l’échangeur de Balata, ça n’a pas été simple. Quand il a fallu lancer l’usine d’eau potable de Matiti, ça n’a pas été simple non plus. C’étaient des débats techniques, sans allégeance. Ce que je peux reprocher aux Guyanais, c’est que nos batailles se déroulent sur le territoire, mais une fois qu’on est aux ministères, nous devons être unis.
Vous avez repris la présidence de Guyane Rassemblement…
J’ai été élu ! Nuance (rires)…
Quel est le but ? Remettre le parti en ordre de marche après une défaite électorale ou d’aller aux législatives…
Laissez parler. La Guyane est un pays de flot de paroles… Non c’est pour assurer la transition. Maintenant, il faut passer à un nouveau stade, pour confier à une nouvelle équipe la tête de ce grand parti, qui reste le plus grand parti de Guyane. Il faut relancer la machine. Il va y avoir un congrès d’ici janvier et de nouvelles têtes vont émerger.
C’est quoi l’avenir de Rodolphe Alexandre ? Un fauteuil de député ?
Mon avenir c’est mon péyi, c’est la Guyane. J’ai des propositions pour aller ailleurs. Je ne les ai pas accepté. Moi je suis bien. J’ai pris de la hauteur. Je fais des conférences. J’ai fait en Martinique. Une prochaine aura lieu à Paris. J’ai commencé un scénario avec un groupe de distribution bien connu. Je travaille aussi sur des livres. Je travaille avec mon temps. Sans pression.
Vous êtes une « bête politique »… On ne vous imagine pas ne pas repartir au combat…
Repartir au combat signifie quoi. On verra quels sont les candidats que mon parti va désigner pour les législatives. Et c’est sûr que si mon parti décide d’y aller, je serai devant, à côté, derrière… C’est vrai que je suis comme disais Aimé Césaire : « le cheval de bataille qui a l’odeur de la poudre ».
Sur la 1er ou la seconde ?
Moi j’ai toujours dit il n’y a pas que moi. Il y a des hommes et des femmes autour de moi qui apportent leurs familles, leurs bien-être parfois au rythme de sacrifices…
Les législatives dépendront du résultat des présidentielles ?
C’est ce qu’on dit en général… pour l’instant c’est un peu tôt pour se prononcer.
C’est une situation inédite qu’il n’y ait pas de député sur une circonscription…
Ah ben ça demandez au responsable (rires)… Demandez à celui qui n’avait pas prévu qu’il allait être… que ça suppléante ne l’aurait pas remplacé. Or nous perdons un siège. Nous perdons une voix. Il a sacrifié un poste législatif pour la Guyane…
Vous avez parlé du parti pour mettre en place de nouvelles personnes… Vous avez toujours cité Othily… Mentor ça vous plaît ce rôle ?
Je ne sais pas si je suis un mentor… mais regardez tous les jeunes qu’on a lancé… Isabelle Patient, Boris Chong Sit, Benfenino Warheid à Saint-Laurent… Tous ces jeunes sont partis de technicité dans leur métier sont désormais installés. J’ai apporté des soutiens sans faille aussi à Ringuet, pour Céline Régis, ou plus ancien, à Georges Elfort que j’ai soutenu dès le départ lorsque j’étais encore au PSG. Même au MDES et à Walwari, il y a des jeunes que j’ai formé. Toute ma vie j’ai été délégué à la formation au Parti socialiste guyanais. Aujourd’hui, j’observe la vérité de tous ces hommes politiques.
Lénaïck Adam ?
Lénaïck Adam… on a pu travailler ensemble.
Vous l’avez aidé quand même ?
Enormément. Mais Lenaïck il est venu à part. Lénaïck c’est… on va dire.. la petite cuillère d’or qui sort du lot parce qu’en fait on l’a conduit avec la CTG. On lui a tracé un layon. Mais quand je parle de la formation, je parle de tous ces jeunes. A Montjoly…Ils ont été des militants.. On a parfois oublié toutes ces personnes qui ont été élus et que j’ai lancé.
« Petite cuillère d’or » ? vous êtes fier de ce qu’il a réalisé en tant que conseiller territorial et député Lénaïck Adam ?
Ah vous me cherchez là. No comment. Je ne vais pas répondre là.
Le PSG essaie de se restructurer. Pour Nahel Lama le parti peut ressusciter.. vous y croyez ?
Le mot ressusciter me dérange. Il va peut être régénérer mais ressusciter non car l’âme du PSG est partie avec toutes ces personnes qui ont donné de leur vie, de leur travail et tous ces sacrifices… Je suis en train de terminer un ouvrage sur Catayée et en l’occurrence il n’y en a pas un qui incarne à l’heure actuelle les espérances de ce peuple déshérité, désavoué, abandonné… et qui a été conduit par Justin Catayé jusqu’à son sacrifice dans le crash aérien. Le PSG c’est à la fois une vision et une espérance mais ce sont aussi des familles. C’est une communauté, celle des Saint-Luciens. Les Créoles n’ont pas adhéré tout de suite au PSG. Catayé est honnis par la SFIO et c’est pour ça qu’il se tourne vers la communauté d’espoir des banlieues du côté d’Anatole, de Bonhomme… et c’est avec eux, qu’on traitait de racailles à l’époque, qu’il a créé ce beau parti. Mais l’âme a disparu. Je préfère les laisser travailler à une regénéréscence.. mais la base a vacillé.