L’album regroupe des titres qui racontent des parcelles d’histoires personnelles des artistes, qui sont également des histoires de tous les jours, des problèmes que confronte la population haïtienne, des moments d’amour. « Legba » est le premier titre de l’Album, dans la légende du vodou, ce dernier représente le messager des carrefours, il est le dieu qui porte les réflexions, l’intermédiaire entre les « Loas ». Ce morceau a été dévoilé le 14 août dernier avec un clip qui se veut représentatif de cet univers, et qui a été réalisée par KITFILM sous la direction du réalisateur Samuel Suffren, en guise d’annonce à l’album, pour donner le ton au travail effectué. « LEGBA, c’est une façon de porter les messages de Liminasyon, et ces messages ne sont pas d’ordre initiatique comme beaucoup pourraient le penser puisque nous parlons de vodou. Ce sont des messages de la vie d’aujourd’hui, des discriminations que nous subissons au quotidien, du patriarcat, de la banalisation de la vie. C’est un hymne à la dignité et au courage. Il n’y a une vérité qui lie vodou et droits humains, c’est la vérité de la lutte. »
Après LEGBA, l’on retrouve sur la lancée Congo et Brav, deux titres qui abordent la résistance. « CONGO est une interprétation de la dernière lettre de Patrice Lumumba à sa femme, et « Brav » est un appel à l’engagement citoyen de chaque individu, qui, ensemble, d’un front, vont se libérer de l’oppression. » Ces deux titres font aussi référence aux Ganga. Ce sont des lwa guerriers qui symbolisent la résistance dans la légende vodouesque, se situent au deuxième stationnement lors de la fête du 15 août à Lakou Soukri division Congo. « Le 15 aout, est le jour qui suit la cérémonie du bois-caïman. C’est aussi le jour de l’indépendance du Congo » souligne le directeur artistique de Liminasyon.
Le titre « Refren Doulè », lui, évoque des blessures profondes de façon très poignante. Cette chanson parle de viol et d’inceste. « Cette chanson a amené des larmes, des conflits, des moments de grande solitude, des moments de fragilité » confie Miracson Saint-Val. « Refren Doulè » est écrite par Ketsia Vaïnadine et composé par Jimmy Kerby Toussaint. C’est le directeur musical du projet et est interprétée par Néhémie Bastien.
« Koulè Lanmou » placé en 15e position sur l’opus, n’en dit pas moins. Ce morceau porte une phrase code, une phrase type qui exprime l’essence même du titre « M renmen Moun mwen vle, m renmen moun ki fè m byen ». Face à une liberté encore très problématique en Haïti, la compagnie Bazou invite à « regarder comment les communautés vodou se positionnent sur ces questions ».
Liminasyon s’achève avec « Jouk Mwen », qui signifie « ma souche ». C’est une mélodie en parole daki (paroles voilées) qui « révèle beaucoup sur ce que nous sommes comme peuple » conclut Miracson Saint-Val.
En sommes, Liminasyon illustre la société haïtienne actuelle. Il projette sur un écran l’ensemble des réalités quotidiennes du pays: « Ce sont des questions auxquelles nous devons réfléchir parce que ces maux nous rongent. Mais en même temps, cet album s’inscrit dans une perspective globale. Le local peut apporter des réponses au global et le global influence le local. Nous nous sommes fixés des objectifs que ce soit au niveau de la recherche, que ce soit au niveau de la création comme analyser les types de rapports qui existent entre les droits humains et le vodou pour voir comment ils arrivent à s’interpénétrer dans un cadre global, d’identifier et définir les valeurs et les pratiques du vodou qui peuvent être transférées en tant que valeur universelle au niveau global, notamment dans le cadre de la réflexion sur les droits humains ; montrer et analyser les dimensions multiples du vodou, notamment sa dimension de lutte pour le respect des droits de la dignité humaine. »