Ce vendredi à 18h, en l’église de Mirza, aura lieu la messe de huitaine de Tatie Léodate. Nous avons rencontré ses proches afin qu’ils nous parlent d’elle.
Son rire gras et chaleureux ne résonnera plus.
Mercredi 21 août, c’est entourée de sa famille, que Léodate Saibou, s’est éteinte, emportant avec elle une page entière de l’histoire guyanaise.
Son départ marque la fin d’une époque, mais son héritage reste profondément ancré dans les cœurs de ceux qu’elle a touchés.
Avant d’être la Tatie Léodate que tout le monde connaissait, elle était avant tout une mère. Celle de Rollin, Norbert, Viviane, Dominique, Serge, Jean-Renaud, Clara, Carène, Naza, sans oublier Rollé son neveu qu’elle a élevé comme son propre fils. « C’est notre frère« , confient une partie de la fraterie, que nous avons rencontrés à la Rénovation Urbaine, où elle vivait depuis des décennies.
Ce quartier, elle y était profondément attachée, et ses enfants se souviennent d’elle comme d’une mère aimante, mais stricte. « Maman était dure avec nous, même si elle était plus douce avec Carène et Naza« , se rappellent-ils, évoquant aussi son rôle de grand-mère gâteau.
Originaire de Trou Poisson, Tait Léodate aimait raconter qu’elle avait été « la première SDF de Guyane« .
Après avoir quitté son village avec ses deux enfants, elle avait trouvé refuge chez Sô Po, avant de s’installer chez Monsieur et Madame Éloge sur la route de la Madeleine. Ce n’est qu’au début des années 1970 qu’elle a trouvé un foyer stable à la Rénovation.
Fouyaya ké so caméraman
Sa notoriété s’est construite sur des décennies d’engagement culturel, notamment à travers son émission dominicale « Fouyaya ».
Vêtue de ses plus belles tenues traditionnelles, elle couvrait les événements culturels de Guyane aux côtés de “Mo caméraman” que personne ne voyait, mais que tout le monde connaissait.
Yves Robin, qui a travaillé avec elle pendant 14 ans, se souvient de ses émissions où tout se faisait en improvisation totale. « Tout était spontané, à l’image de Tatie elle-même« , se souvient-il, en évoquant une femme au caractère bien trempé, mais aussi généreuse et respectée.
Le parcours de Tatie Léodate n’a pas été sans embûches. En 2017, elle a été victime de critiques acerbes, mais elle a su transformer cette épreuve en force.
« Son titre “Palé a sou mo” est la réponse qu’elle a donnée à ses détracteurs« , raconte Naza. Cette chanson, devenue emblématique, témoigne de sa résilience et de sa capacité à puiser dans l’adversité l’énergie nécessaire pour aller de l’avant. Ses enfants, marqués par cette période, reconnaissent que cet épisode a été difficile à surmonter, même pour une femme aussi forte qu’elle. « C’est comme un pied de nez à ceux qui se sont moqués d’elle« , déclare Dominique avec fierté.
Une grande veillée culturelle
La disparition de Tatie Léodate laisse un vide immense. Une grande veillée culturelle lui a été dédiée au Zéphyr, un hommage qui, bien que solennel, a aussi été un moment de célébration de sa vie.
« J’aurais voulu un moment plus intime« , confie Carène, sa fille, qui a passé de nombreuses années en France. « Je découvre aujourd’hui l’ampleur de sa notoriété et j’en suis fière, même si c’est aussi douloureux, car je n’ai pas pu me recueillir comme je l’aurais voulu« , ajoute-t-elle.
Pour son fils Jean-Renaud, il est évident que Leodate appartenait à toute la Guyane. « Elle était la Tatie de tous, et elle méritait cet hommage« , conclut-il.
Le départ de Leodate Saibou est une perte incommensurable, mais son héritage perdure. Elle a su incarner et représenter la culture guyanaise avec force et passion.
Aujourd’hui, il ne nous reste qu’à la remercier.
Merci, Tatie Léodate, pour ton franc-parler, tes combats, et pour avoir si bien représenté notre Guyane. Ton rire ne résonnera plus, mais to lespri ké toujou roulé so grajé.
Bon vent, Tatie Léodate.