C’est un chantier spectaculaire et ô combien symbolique. Les tours Floralies sont en train d’être détruites. D’ici février, il ne devrait plus rien rester des deux plus hautes tours que Cayenne ait connu. La première est quasiment achevée. La seconde va l’être en janvier.
Le lancement officiel de la campagne de démolition des tours Floralies a été engagé le 23 novembre dernier. L’entreprise STRG de Mathieu Antoinette est chargée de ce chantier sur des terrains et bâtiments qui appartiennent à la Siguy, maître d’œuvre. Les deux tours, érigées en 1975 vont être successivement détruites l’une après l’autre.
Un patrimoine urbain
Les tours Floralies font partie du patrimoine urbain de Cayenne. Elles ont accompagné plusieurs générations de Cayennais, qui y sont nés, y ont grandi et y ont vu de nombreux instants et tranches de vie s’y dérouler. C’est finalement l’actuelle maire de Cayenne Sandra Trochimara qui a lancé ces travaux de démolition décidés par ses prédécesseurs. La question de la condamnation puis de l’abattage des deux tours les plus hautes de la ville a été dans un premier temps engagée sous la mandature de Jean-Claude Lafontaine avant d’être accélérée par Rodolphe Alexandre puis d’être définitivement actée par Marie-Laure Phinéra-Horth, qui en a fait l’un des chantiers majeurs de l’Anru, le programme d’aménagement et de rénovation urbaine de Cayenne. L’évacuation des tours a eu lieu il y a plusieurs années maintenant, mais la démolition a pris du retard en raison notamment du désamiantage, qui a pris plus de temps que prévu. Nous sommes allés à votre rencontre pour recueillir vos impressions. Et que vous soyez jeunes ou moins jeunes, c’est un pan entier des mémoires collectives et personnelles de nombreux habitants qui sont chamboulées.
Micro trottoir



Paul : « Dur de voir mes souvenirs d’enfance détruits pas à pas »
« J’ai vécu une quinzaine d’années ici. J’habitais au 4e étage de la tour 2. Je ne vais pas vous mentir (silence), j’ai grandi ici et ce sont tellement de souvenirs. C’est le basket. On jouait tous les jours. On jouait tous les jours au basket ici. J’ai aussi perdu des proches. Et toute mon enfance c’était ici. (Larmes) Beaucoup d’émotion oui en voyant ça. C’est la vie malheureusement. Là maintenant on habite à Chicago. On nous avait déménagé parce qu’il y avait de l’amiante dans les bâtiments. Ça rendait des gens malades et donc on nous avait fait déménager à Chicago, où l’on est encore. Mais là je passe pour voir ces derniers souvenirs qui sont détruits un à un. »
Yoni : « Les tours resteront indissociables du basket »
« C’est ma maman qui habitait ici. Elle habitait au 2e étage de la Tour 1. Je venais donc souvent ici jusqu’à mes 7 ans. Mon sentiment c’est la tristesse. On a vécu beaucoup de choses ici. Des amis sont morts ici. Il y a eu aussi de bons moments passés, à cache-cache, des délires, des checks… Oui, beaucoup d’amusements aussi. C’est ce qu’il faut retenir. Et des victoires aussi. Les Tours resteront indissociables du basket pour moi et tellement de jeunes et moins jeunes cayennais. L’ASC Tour a été champion plusieurs fois, en cadets, en U17, et U20. On a eu de sacrées équipes ! »
Wilfried : « On se retrouvaient tous ici »
« J’ai vécu deux ans ici aux tours Floralies au début des années 2010. Il y a tellement de choses qui se sont passées ici. On avait des terrains de foot, de basket, des balançoires. On se retrouvaient tous ici. On vivait autour des tours. Ça ne peut pas s’effacer comme ça. »
Corine : « Nous n’avons pas été prévenu du début de la destruction »
« J’ai vécu dans les deux tours, de 1977 jusqu’en 1985. Je suis très triste. Les habitants n’ont pas été averti de la démolition. Nous avons été peu nombreux à pouvoir assister au lancement des travaux car la mairie ne nous a même pas averti. La maire est montée sur l’engin pour les photos mais nous les anciens habitants aurions pu être informés. Ce n’est pas bien. De grandes et belles familles ont vécu et grandit ici. Quand on parle d’urbanisme et de Cayenne, on pense forcément aux tours Floralies. C’est triste. »
Jean-Jacques Stauch, directeur général de la Siguy : « On écrit une nouvelle page du quartier »
« Ce que je peux dire aux habitants, c’est qu’on est en train d’écrire une nouvelle page du quartier. Les tours, telles que construites dans les années 70, ne pouvaient pas être réhabilitées en l’état. J’assume aujourd’hui, mais ce n’est pas moi qui l’ai décidé à l’époque. A la place de la tour 2, il y aura de nouveaux logements, moins hauts, mais nous maintenons les capacités de logements intermédiaires dans le secteur. Sur la tour 2, on va construire un équipement culturel qui sera mis à disposition des Cayennais. »
Samir MATHIEU